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La santé à Pionsat : isolement, vieillissement, regroupement en campagne

Côté campagne, visites de villages

Mme Ravet, maire de Saint Hilaire propose une visite de sa commune.

Elle nous accueille dans sa nouvelle bibliothèque municipale, projet qui représente sa première initiative en tant qu’élue. Un petit lieu chaleureux, qui draine habitants proches et même certaines personnes des hameaux et villages périphériques. L’ouverture de cette bibliothèque municipale a permis d’impliquer des bénévoles, personnes parfois seules comme cette dame qui vient de perdre son mari. « C’est une bibliothèque mais surtout un lieu de rencontre».

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Elle nous invite ensuite à visiter des hameaux de ce village de moins de 100 habitants étendu sur 17 Km… Elle nous indique des personnes particulièrement isolées, note des problèmes relativement fréquents de voisinage, pour qui la seule entraide s’avère celle d’extrême urgence. Un repérage qui nous permettra peut-être d’aller rencontrer de nouveaux habitants/ usagers des services de soin.

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Plus tard, madame Dumas, employée à la maison de retraite de Pionsat, nous accueille pour témoigner de son expérience professionnelle. Les personnes âgées accueillies arrivent à l’EPHAD à la fin de leur vie. « Il y a 15 ans il y avait encore des gens avec qui on pouvait faire des choses (belote, sorties..) Aujourd’hui ce n’est plus possible ». Un médecin coordinateur vient en visite une fois par semaine, mais les personnes gardent leur médecin traitant, chez qui elles se rendent en ambulance. Le chantier en cours permettra d’accueillir les résidents dans de meilleures conditions, en chambres individuelles ou en chambre commune pour certains couples.

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3e jour de résidence à Pionsat

Duo Côté ville, visite à Montluçon.

Aujourd’hui nous accueillons Gisèle Bessac alors que Romain Thévenet nous quitte pour rejoindre d’autres résidents à Rennes. L’opportunité entre 2 trains de faire un pas de côté, en Allier, pour rencontrer Mme Bélicot, responsable du CLIC (centre local d’Information et de Coordination) de la Vallée de Montluçon et du Cher, territoire qui jouxte la Communauté de communes de Pionsat.

Le rendez-vous se situe dans le pôle de maintien à domicile initié par la ville de Montluçon en 2003, avec objectif de rassembler un maximum de services pour les personnes âgées de plus de 60 ans, grâce à une prise en charge socio – médicale globale. Le lieu rassemble le SSIAD (infirmiers à domicile), un centre d’animation municipal (clubs, restaurants, animations…), une association d’aide à domicile (120 salariés), une entreprise de téléassistance, l’association France Alzheimer… « C’est un guichet unique qui répond à 95% des demandes des personnes qui viennent jusqu’ici ».

En savoir plus sur l’entretien avec Mme Bélicot

Installé en plein centre de Montluçon dans une bâtisse très chaleureuse, nous retrouvons plus tard M. Guy DOUSSOT, Directeur du Pays de Montluçon et du Cher.

Les problématiques de santé liées à l’aménagement du territoire sont là encore au cœur des préoccupations de ce Pays voisin de celui des Combrailles, dont la frontière se termine sur la communauté de communes de Marcillat, à quelques kilomètres de Pionsat. De leur côté, ils travaillent à un schéma directeur des services de santé, exigé par la Région. Le pays est composé de nombreuses zones fragiles, isolées mais organisées autour de pôles. Contrairement à ce que l’on pouvait penser le problème du renouvellement des médecins et du personnel médical de l’hôpital est très présent au cœur de la ville même de Montluçon. Le Conseil Général de l’Allier a même mis en place une campagne d’information et d’accueil particulièrement volontariste.

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Monsieur Doussot se méfie de la tentation des collectivités locales pour les maisons de santé surtout s’il s’agit pour ces derniers de construire des murs et de créer une nouvelle sorte de zone d’activités. Pour lui ces projets n’ont d’intérêt que s’ils sont pensés comme des plaques tournantes ou des points de fuite, permettent de repenser les questions globales de santé, de les réorganiser. Il est alors très intéressé par la démarche de Pionsat comme territoire de expérimentation méthodologique, pour avoir un regard concret sur la démarche.

En savoir plus sur la rencontre avec Guy DOUSSOT, Directeur du Pays de Montluçon et du Cher.

http://pays-vallee-montlucon.planet-allier.com/

Imaginer l’avenir santé en campagne

Visite au pays de Pionsat, dans le nord de l’Auvergne

Pionsat est une petite ville de 1040 habitants, chef lieu d’un canton de 10 communes et de 2000 habitants, située en Auvergne, à quelques 30 kilomètres de Montluçon et à 80 kilomètres de Clermont Ferrand. C’est un territoire très rural, montagneux, composé de multiples hameaux disséminés entre cols et monts, situé en frontière entre deux régions (Auvergne et Limousin) et 3 départements (Puy de Dôme, Allier, Creuse) ; un découpage administratif complexe qui n’épouse à priori pas vraiment les pratiques de ses habitants…

La place du marché de Pionsat

Une équipe de la 27ème région s’y retrouve le 31 juillet, accueillis par François Brunet, président de la communauté de communes et par Hélène Berger, directrice des services ; un duo jeune et dynamique qui leur a concocté un riche programme du jour. C’est la région Auvergne, préoccupée par l’aménagement du territoire et le maintien des services publics en milieu rural, de plus en plus sollicitée sur les questions de santé, qui nous a orientés vers cette résidence. Elle souhaitait questionner l’engouement actuel pour les « Maisons de la santé » qui s’inventent avec son soutien sur tout le territoire. Dans le mini bus dédié aux transports des enfants, l’équipe a sillonné les petites routes de la communauté de communes pour rencontrer professionnels de santé et élus, et prendre conscience de la réalité géographique du territoire, faite de villages, de hameaux éparses, de bois de feuillus et de prés propices à l‘élevage de bovins et à la petite céréaliculture.

La communauté de communes de Pionsat porte, avec les professionnels de la santé de son territoire, un projet de « Maison pluridisciplinaire de santé » qui permettrait avant tout d’imaginer le maintien local des services médicaux, une inquiétude partagée. En regroupant les cabinets individuels et en créant du réseau, on espère pouvoir attirer « les jeunes médecins qui craignent la solitude ».
Actuellement cinq médecins, deux kinésithérapeutes, un dentiste… tous installés en libéral et à domicile, constituent le cœur de l’offre médicale de la communauté de Communes. Il existe aussi une Maison de retraite et un Centre de Rééducation Fonctionnelle (APAJH) très important (120 résidents permanents) qui draine des patients dans un rayon de 40 km, indique M. Robert son directeur, un atout non négligeable pour Pionsat. Cependant, comme partout à la campagne, le tissu local est fragile (3 Médecins prendront leur retraite dans les 8 ans à venir ; une unique Pharmacie alimente tout le secteur), et le renouvellement devient de plus en plus complexe… Et déjà, c’est à Montluçon ou à Clermont-Ferrand que se rendent les habitants pour toutes les urgences et les rendez vous avec les spécialistes. D’après les hôtes « la situation de péril peut arriver rapidement» ; elle contribuerait à la désertification du territoire. C’est alors «contraints et forcés» que les médecins se regroupent, soutenus par la Communauté de Communes, et créent en avril 2009 un comité de pilotage d’une Maison de Santé pour anticiper l’offre de services médicaux du territoire. L’objectif pour le comité de pilotage du projet est alors de construire rapidement un cahier des charges pour définir le projet de la Maison de la santé et obtenir le soutien de la région. Mais comme le précise François Brunet « c’est aussi rechercher plus profond dans les motivations », et « que cette maison ne permette pas seulement d’enlever le cabinet médical de la maison » mais améliore la mise en réseau de tous les acteurs médicosociaux. Il s’agit alors « de penser un territoire de santé global ».

La commune de Chateau-sur-Cher, 93 habitants

Cette première journée riche de témoignages et d’échanges nous a permis de définir trois pistes d’entrée dans le projet :

# L’OFFRE PACKAGE DU NOUVEAU MEDECIN
Le territoire souffre d’un manque d’attractivité, auquel n’échappent pas les professionnels de santé qui boudent le territoire. On doit alors rechercher comment donner envie aux soignants de venir s’installer dans cette région de la France. Cela nécessite peut être de travailler dans d’autres champs que celui de la santé: par exemple la culture, l’habitat, la valorisation touristique, pour travailler au delà, à l’accueil de nouveaux habitants ? Ce centre médical peut  éventuellement adopter un rôle de rencontre, de partage autour des questions sociales et devenir un lieu de vie ouvert qui participe au dynamisme du territoire et à son attractivité.

# «LA MAISON DE SANTÉ», CŒUR DE RÉSEAU

Le projet de maison de santé peut-il permettre d’améliorer la coordination des  réseaux des professionnels médico-sociaux du territoire ? Comment alors articuler les échelles et coordonner les différents secteurs ? Il serait intéressant alors d’imaginer une cartographie des réseaux existants, en vue de les comprendre, de pointer les potentiels d’optimisation pour chacun et de tisser des liens entre eux. Cette maison pourrait elle alors devenir le «carrefour» médical, ou socio-médical de la région ? Et être un apport potentiel dans les réseaux tels qu’ils existent aujourd’hui ? Il s’agit aussi de penser une approche systémique et de relier ce projet aux autres enjeux du territoire (culture, habitat, tourisme…).

# LES ROUTES DE LA SANTÉ

La configuration de ce territoire rural nous amène à prendre en compte les problématiques d’isolement, de déplacement et de mobilité. La visite des communes de Château sur Cher et de La Roche Jagout, nous ont fait éprouver les difficultés d’accès et l’isolement des habitants. Les élues ont témoigné de leurs expériences personnelles d’accompagnement de la fin de lvie de leurs parents chez elles. Une chance, difficile à mettre en œuvre et réservée à des personnes pleine de ressources (l’une a une formation d’infirmière), qu’elles souhaiteraient pouvoir offrir aux personnes vieillissantes de la commune. Cela amène à considérer les systèmes d’entraides, de solidarités et de surveillances et à intégrer les aidants dans le projet de santé de territoire. Le maintien à domicile et le vieillissement demandent une présence décentralisée sur l’ensemble du territoire. Comment alors sortir des problématiques de juridictions ? Les hôpitaux étant relativement éloignés, comment la maison de santé pourrait être à la fois un relais de ceux-ci mais aussi un lieu de la prévention ? Serait-il envisageable de penser les petits bobos aussi bien que les urgences médicales ? Cette réflexion sera utile dans d’autres axes d’aménagement du territoire : épiceries ambulantes, services administratifs, postaux, convivialité, culture, etc , tout ce qui évite ou minore le sentiment de solitude et l’isolement à tout âge, et l’incapacité à vivre chez soi dans le grand âge.

L’équipe de la 27ème composée de Romain Thévenet, Adélaïde Schindler, Gisèle Bessac, Marie Coirié, Fanny Herbert bientôt rejoints par Julie Bernard devrait intervenir à l’automne prochain, de Septembre à Décembre.

Marie Coirié, Fanny Herbert, Hélène Berger et Adélaïde Schindler