Visite au pays de Pionsat, dans le nord de l’Auvergne
Pionsat est une petite ville de 1040 habitants, chef lieu d’un canton de 10 communes et de 2000 habitants, située en Auvergne, à quelques 30 kilomètres de Montluçon et à 80 kilomètres de Clermont Ferrand. C’est un territoire très rural, montagneux, composé de multiples hameaux disséminés entre cols et monts, situé en frontière entre deux régions (Auvergne et Limousin) et 3 départements (Puy de Dôme, Allier, Creuse) ; un découpage administratif complexe qui n’épouse à priori pas vraiment les pratiques de ses habitants…
Une équipe de la 27ème région s’y retrouve le 31 juillet, accueillis par François Brunet, président de la communauté de communes et par Hélène Berger, directrice des services ; un duo jeune et dynamique qui leur a concocté un riche programme du jour. C’est la région Auvergne, préoccupée par l’aménagement du territoire et le maintien des services publics en milieu rural, de plus en plus sollicitée sur les questions de santé, qui nous a orientés vers cette résidence. Elle souhaitait questionner l’engouement actuel pour les « Maisons de la santé » qui s’inventent avec son soutien sur tout le territoire. Dans le mini bus dédié aux transports des enfants, l’équipe a sillonné les petites routes de la communauté de communes pour rencontrer professionnels de santé et élus, et prendre conscience de la réalité géographique du territoire, faite de villages, de hameaux éparses, de bois de feuillus et de prés propices à l‘élevage de bovins et à la petite céréaliculture.
La communauté de communes de Pionsat porte, avec les professionnels de la santé de son territoire, un projet de « Maison pluridisciplinaire de santé » qui permettrait avant tout d’imaginer le maintien local des services médicaux, une inquiétude partagée. En regroupant les cabinets individuels et en créant du réseau, on espère pouvoir attirer « les jeunes médecins qui craignent la solitude ».
Actuellement cinq médecins, deux kinésithérapeutes, un dentiste… tous installés en libéral et à domicile, constituent le cœur de l’offre médicale de la communauté de Communes. Il existe aussi une Maison de retraite et un Centre de Rééducation Fonctionnelle (APAJH) très important (120 résidents permanents) qui draine des patients dans un rayon de 40 km, indique M. Robert son directeur, un atout non négligeable pour Pionsat. Cependant, comme partout à la campagne, le tissu local est fragile (3 Médecins prendront leur retraite dans les 8 ans à venir ; une unique Pharmacie alimente tout le secteur), et le renouvellement devient de plus en plus complexe… Et déjà, c’est à Montluçon ou à Clermont-Ferrand que se rendent les habitants pour toutes les urgences et les rendez vous avec les spécialistes. D’après les hôtes « la situation de péril peut arriver rapidement» ; elle contribuerait à la désertification du territoire. C’est alors «contraints et forcés» que les médecins se regroupent, soutenus par la Communauté de Communes, et créent en avril 2009 un comité de pilotage d’une Maison de Santé pour anticiper l’offre de services médicaux du territoire. L’objectif pour le comité de pilotage du projet est alors de construire rapidement un cahier des charges pour définir le projet de la Maison de la santé et obtenir le soutien de la région. Mais comme le précise François Brunet « c’est aussi rechercher plus profond dans les motivations », et « que cette maison ne permette pas seulement d’enlever le cabinet médical de la maison » mais améliore la mise en réseau de tous les acteurs médicosociaux. Il s’agit alors « de penser un territoire de santé global ».
Cette première journée riche de témoignages et d’échanges nous a permis de définir trois pistes d’entrée dans le projet :
# L’OFFRE PACKAGE DU NOUVEAU MEDECIN
Le territoire souffre d’un manque d’attractivité, auquel n’échappent pas les professionnels de santé qui boudent le territoire. On doit alors rechercher comment donner envie aux soignants de venir s’installer dans cette région de la France. Cela nécessite peut être de travailler dans d’autres champs que celui de la santé: par exemple la culture, l’habitat, la valorisation touristique, pour travailler au delà, à l’accueil de nouveaux habitants ? Ce centre médical peut éventuellement adopter un rôle de rencontre, de partage autour des questions sociales et devenir un lieu de vie ouvert qui participe au dynamisme du territoire et à son attractivité.
# «LA MAISON DE SANTÉ», CŒUR DE RÉSEAU
Le projet de maison de santé peut-il permettre d’améliorer la coordination des réseaux des professionnels médico-sociaux du territoire ? Comment alors articuler les échelles et coordonner les différents secteurs ? Il serait intéressant alors d’imaginer une cartographie des réseaux existants, en vue de les comprendre, de pointer les potentiels d’optimisation pour chacun et de tisser des liens entre eux. Cette maison pourrait elle alors devenir le «carrefour» médical, ou socio-médical de la région ? Et être un apport potentiel dans les réseaux tels qu’ils existent aujourd’hui ? Il s’agit aussi de penser une approche systémique et de relier ce projet aux autres enjeux du territoire (culture, habitat, tourisme…).
# LES ROUTES DE LA SANTÉ
La configuration de ce territoire rural nous amène à prendre en compte les problématiques d’isolement, de déplacement et de mobilité. La visite des communes de Château sur Cher et de La Roche Jagout, nous ont fait éprouver les difficultés d’accès et l’isolement des habitants. Les élues ont témoigné de leurs expériences personnelles d’accompagnement de la fin de lvie de leurs parents chez elles. Une chance, difficile à mettre en œuvre et réservée à des personnes pleine de ressources (l’une a une formation d’infirmière), qu’elles souhaiteraient pouvoir offrir aux personnes vieillissantes de la commune. Cela amène à considérer les systèmes d’entraides, de solidarités et de surveillances et à intégrer les aidants dans le projet de santé de territoire. Le maintien à domicile et le vieillissement demandent une présence décentralisée sur l’ensemble du territoire. Comment alors sortir des problématiques de juridictions ? Les hôpitaux étant relativement éloignés, comment la maison de santé pourrait être à la fois un relais de ceux-ci mais aussi un lieu de la prévention ? Serait-il envisageable de penser les petits bobos aussi bien que les urgences médicales ? Cette réflexion sera utile dans d’autres axes d’aménagement du territoire : épiceries ambulantes, services administratifs, postaux, convivialité, culture, etc , tout ce qui évite ou minore le sentiment de solitude et l’isolement à tout âge, et l’incapacité à vivre chez soi dans le grand âge.
L’équipe de la 27ème composée de Romain Thévenet, Adélaïde Schindler, Gisèle Bessac, Marie Coirié, Fanny Herbert bientôt rejoints par Julie Bernard devrait intervenir à l’automne prochain, de Septembre à Décembre.