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La gare rurale de demain, première visite

Nous étions le 11 février, en visite dans trois gares de Bourgogne pour évaluer le potentiel d’une future résidence autour du sujet de la gare rurale. les photos de la journée sont visibles ici.

Romain Thévenet était présent pour la 27e Région, accompagné de Adrien Demay, designer, de Pierre Gaudin et Laurent Jacobi, consultants en créativité, et de Mihaela Bonescu chercheuse à l’université de Dijon.

Un partenariat est établi avec la Région Bourgogne et la SNCF, et pour cette pré-visite nous avions choisis ensemble de visiter trois gares sur la même ligne: la ligne de Laroche Migennes à Corbigny.

La matinée commence par une première expérience imprévue. Trop absorbés par nos échanges avec Luc Fousset , mandaté par la SNCF/activité Gares et Connexion pour être notre guide pour la journée, nous sommes montés dans le mauvais wagon du train pour Corbigny.

Nous nous sommes ainsi retrouvé à Avallon, à 40 kilomètre de notre destination!

Le train se sépare en deux à Cravant Bazarnes, et nous n’étions pas dans la bonne partie du train…

Corbigny, le bout de la ligne

Un taxi nous emmène finalement à Corbigny pour rattraper le programme de la journée. Nous sommes accueillis par Isabelle Monmasson et Laurianne Legeay du comité de développement du Pays Nivernais Morvan, et Patrick Marmion, adjoint au maire de Corbigny et président de l’Office du tourisme.

Ils nous brossent rapidement le portrait de cette gare de « bout de ligne ». Corbigny est un terminus rural assez particulier, probablement la plus petite commune dont le nom est annoncé dès le départ de Paris.

Il n’y a actuellement plus que 2 trains par jours. Un qui part le matin, un qui arrive le soir (on peut habiter à Corbigny, mais pas venir pour y travailler…) Ils transportent environ 5 voyageurs par jour l’hiver, et 3 à 4 fois plus l’été.

Un bus complète cette offre avec un trajet 6 fois par jour qui permet de relier les différentes communes entre Corbigny et Clamecy. Nous avons le sentiment que la gare est « sous perfusion », et mesurons la volonté locale nécessaire pour réussir à maintenir ce service de proximité.

Même la Sncf a déserté la gare, et en sous-traite la gestion à la filiale VFLI. Il reste également encore un peu de fret pour transporter les production locales : du bois et des pierres.

Nous avons eu peu de contact avec les agents de gare sur place dont l’information relative à notre passage ne leur était pas parvenue.

Au final on se rend compte de la richesse d’acteurs et d’événements à Corbigny (notamment avec l’Abbaye de Corbigny, une résidence d’artistes permanents), mais l’on mesure aussi les difficultés de cette gare délaissée.

Si l’on considère l’évolution des transports ferrés en milieu rural, dans un scénario noir, on peut considérer que cette Gare a 20 ans d’avance. La Sncf s’est désengagée, est ce que cela va devenir une norme ? Elle reste propriétaire des bâtiments, mais pour elle, son action s’arrête à Clamecy. Y a-t-il une opportunité à prendre en compte cette évolution possible pour considérer la gare comme étant autre chose qu’un lieu d’accueil pour les voyageurs en train?

Clamecy, pour combien de temps?

La suite de la visite s’effectue en bus sur la ligne Corbigny Clamecy. A part nous il n’y a personne à cette heure-ci. Deux à trois voyageurs montent dans le bus lorsque nous descendons à Clamecy.

Ici par contre le personnel est au courant de notre visite. Ce sont des salariés SNCF, et ils ont pu être prévenus par leur établissement. Alain nous fait visiter et nous raconte leur quotidien.

A Clamecy, il y a jusqu’à 40 voyageurs par jour l’été. La gare est beaucoup plus active qu’à Corbigny avec 8 trains par jour. C’est une gare rurale mais il y a encore, par exemple, un guichet pour acheter ses billets.

Même si la gare est active, on sent le ralentissement. Un train a été encore supprimé cette année. L’aiguilleur nous confie son ennui: la séparation des compétences à la SNCF depuis le 1er janvier empêche la souplesse des cheminots. Par exemple un  chef de gare ne peut plus vendre au guichet. Pour lui « Il n’y a pas assez de travail, on s’ennuie et ça donne une image négative auprès des usagers »

Nous sommes là dans une gare en transition, « elle bouge encore ». La question qui nous taraude pourtant est « pour combien de temps? » La personne qui est encore au guichet part bientôt à la retraite, sera-t-elle remplacée? Combien de trains vont-ils être encore supprimés? Après Corbigny est-ce que Clamecy sera bientôt, elle aussi, réduite au minimum?

Le train qui nous emmène à Auxerre nous permet de faire le point avec l’équipe. Ces nouvelles rames financées par le conseil régional sont de vrais espaces de travail, avec tables à quatre, et alimentation électrique. A cet instant, nous entrevoyons la possibilité de faire la résidence directement dans le wagon…

Auxerre, une petite gare immense

Nous sommes accueillis par Benoit Vo-Dinh, qui nous présente la gare et l’équipe présente. Auxerre est définitivement une gare en mutation.

Les gens que nous rencontrons ont la responsabilité des trains circulant en gare d’Auxerre, mais également sur la ligne jusqu’à Clamecy, ce qui nous permet de mettre en perspective les discussions du début de journée.

Benoît nous explique que malgré sa taille, cette gare est limitée dans son développement. Par une bizarrerie historique, il n’existe qu’une seule voie entre Auxerre et Laroche Migennes pour relier Paris. Ce qui implique qu’un seul train passe à la fois dans les deux sens. La fréquence des trains entre Auxerre et Paris est à son maximum. Le développement de la gare est donc suspendu à la construction d’une deuxième voie.

Cette gare n’est pas réellement une gare rurale, puisqu’au Auxerre est une ville assez active, mais c’est réellement une gare de seconde zone qui pourrait tourner avec seulement trois salariés. Les opportunités de cette gare sont donc liées à ce dynamisme qui fait d’elle une gare de « très grande banlieue » puisqu’elle est directement connectée à Paris.

Après cette journée riche et passionnante, différents sujets apparaissent:

Trois échelles de gares sur la même ligne

La visite sur cette même ligne, donne l’impression de « zoomer » dans la configuration de ces gares. On pourrait dire également qu’on a trois gares à différents stades de périclitation (ou de maturation?). Ce qui nous fait évoquer la possibilité d’une résidence sur la ligne, plus que sur une gare en particulier, et sur les connexions entre elles.

Le premier étage des gares, des bâtiments pleins de potentiel

Les anciens logements de cheminots, que nous avons pu visiter dans ces gares apparaissent comme étant tous les mêmes dans de nombreuses gares. Que faire de tous ces « premiers étages » promis à la décrépitude ?

Pour cette résidence, c’est la direction « Gare et Connexions » de la Sncf qui nous accompagne. La problématique serait certainement intéressante pour eux, et un prétexte pour envisager l’évolution des gares rurales.

La connexion à Paris, un sujet en tant que tel ?

Il y a aujourd’hui beaucoup de Parisiens qui utilisent cette ligne. Nous avons pu souligner également l’importance des trains du dimanche soir, du lundi matin et du vendredi soir pour ces « résidents pendulaires » qui vivent en Bourgogne et travaillent à Paris. (Ce qui n’est pas sans rappeler un des scénarios de prospective du SRADT)

Cette connexion permet également un afflux de touristes l’été qui arrivent directement de la capitale. Corbigny est « certainement la plus petite gare, directement connectée à Paris » mais est-ce vraiment significatif, quand on pense qu’il faut plus de 4 heures pour aller à Paris? Certains préfèrent prendre leur voiture pour aller à la gare de Montbard.

Peut on miser sur un développement ferroviaire de ces gare?

La gare d’Auxerre est promise à un développement potentiel avec la construction de la deuxième voie, mais quid des deux autres, qui sont plutôt elles, en régression?

Difficulté tangible des cheminots

Un autre sujet pourrait être de travailler directement au contact des salariés Sncf qui avouent qu’il n’y a pas assez d’action. Dans quelle mesure est ce qu’ils peuvent offrir d’autres services? Qu’est ce que la gare doit devenir pour qu’ils retrouvent leur rôle de médiation?

Autant de sujets qui s’annoncent riches et passionnants. Pourtant, nous ne pourrons pas traiter correctement toutes ces questions en seulement trois semaines. Nous allons commencer par choisir, avec l’équipe et les partenaires, une seule gare pour la résidence. Puis nous programmerons une autre visite, afin de préciser encore le sujet de l’expérimentation. L’idée étant, comme dans chacune des résidences, d’attaquer le vaste sujet de « la gare rurale de demain » par la transformation locale, et la réalisation de projets concrets. Cette première visite est, en tout cas, prometteuse pour la suite de la résidence!

Les « pros de la santé » à Pionsat, mais qui sont-ils ?

mosaique

Un jeudi consacré à rencontrer les praticiens du territoire.

On en parle comme d’une espèce en voie de disparition… pourtant ils sont nombreux, actifs et militants. Et même « en augmentation » pour certains : de jeunes infirmiers indépendants, des kinés, qui viennent progressivement améliorer l’offre de soin.

Ce jeudi parmi eux, l’occasion d’observer d’un peu plus près leur parcours, leurs pratiques, d’attraper des bribes de leurs expériences et de leurs connaissances riches du territoire. Qu’ils soient rattachés directement ou de plus loin au projet, il s’agit aussi d’amorcer une discussion sur l’évolution de leur métier, leurs perspectives professionnelles, leur vision de « la maison de santé », leurs motivations et réserves.

Nous les retrouvons tous, et bien plus encore, le soir même pour un comité de pilotage du projet maison de santé. L’occasion de repérer certains praticiens inconnus : chirurgien dentiste, jeune infirmière fraichement arrivée sur le territoire…. et aussi d’identifier les partenaires des réseaux médico- sociaux du territoire. Cette réunion démontre la motivation commune des professionnels de santé et des élus, dont la forte présence laisse à penser que le projet est bien lancé et qu’il mobilise !

Par contre, tous ont bien conscience de la difficulté à gérer la temporalité du projet qui s’étire inévitablement dans le temps et rencontre l’attente impatiente de certains professionnels de santé. « 3 ans c’est la durée moyenne voire minimale pour la mise en place d’une maison de santé » témoignent Céline Bourgue et François Brunet lors de la restitution d’une réunion d’information organisée par l’ETD « Monter une maison de santé, Journée Territoires » organisée le 24 septembre à Paris. Ils décrivent aussi certains projets aboutis, témoignent aussi de la diversité des démarches et du parcours complexe qu’il s’agit d’amorcer. L’Agence Régionale de la Santé propose aussi à la communauté de communes de faire une demande pour qu’ils leur envoient l’appuie d’un cabinet spécialisé dans la mise en œuvre de projets de santé.

Une réunion bien concrète qui semble contribuer à mettre à toute la communauté médicale le pied à l’étrier.

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La santé à Pionsat : isolement, vieillissement, regroupement en campagne

Côté campagne, visites de villages

Mme Ravet, maire de Saint Hilaire propose une visite de sa commune.

Elle nous accueille dans sa nouvelle bibliothèque municipale, projet qui représente sa première initiative en tant qu’élue. Un petit lieu chaleureux, qui draine habitants proches et même certaines personnes des hameaux et villages périphériques. L’ouverture de cette bibliothèque municipale a permis d’impliquer des bénévoles, personnes parfois seules comme cette dame qui vient de perdre son mari. « C’est une bibliothèque mais surtout un lieu de rencontre».

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Elle nous invite ensuite à visiter des hameaux de ce village de moins de 100 habitants étendu sur 17 Km… Elle nous indique des personnes particulièrement isolées, note des problèmes relativement fréquents de voisinage, pour qui la seule entraide s’avère celle d’extrême urgence. Un repérage qui nous permettra peut-être d’aller rencontrer de nouveaux habitants/ usagers des services de soin.

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Plus tard, madame Dumas, employée à la maison de retraite de Pionsat, nous accueille pour témoigner de son expérience professionnelle. Les personnes âgées accueillies arrivent à l’EPHAD à la fin de leur vie. « Il y a 15 ans il y avait encore des gens avec qui on pouvait faire des choses (belote, sorties..) Aujourd’hui ce n’est plus possible ». Un médecin coordinateur vient en visite une fois par semaine, mais les personnes gardent leur médecin traitant, chez qui elles se rendent en ambulance. Le chantier en cours permettra d’accueillir les résidents dans de meilleures conditions, en chambres individuelles ou en chambre commune pour certains couples.

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